LE SECRET DE L AIKI EST PEUT ETRE AU FOND DU PUIT
… Après avoir été malmené des mois, des années. Avoir eu les bras bloqués en plein élan, les poignets vrillés par des kote-gaeshi virulents, des Nikkyos dévastateurs, des sankyo cousus de vengeances, les coudes à la limite du tennis-elboe, des Ude kime nage glissés à la limite de la rupture, des Shio-nage volontairement désaxés, et la nuque forcée par des irimi-nage « made in Guillotin »… un jour, arrive la perception salvatrice.
Celle qui va permettre l’anticipation, la visualisation d’autres perspectives plus constructrices créatives, moins dévastatrices en tout cas.
Nous sommes tous programmés, (c’est ce qui nous distingue des légumes), à gérer ce qui nous arrive de front. On va, sur une attaque frontale, soit se protéger avec les bras, rester tétanisé, nous mettre à courir, ou, pour les plus audacieux, tenter d’attraper la main armée.
Mais la nouvelle solution que nous tentons de décrire ici, c’est la gestion du vide.
Embrasser et gérer le volume non exploité autours de l’arme, dans la sphère de l’attaquant. Tout ce volume inexploité avant que l’attaque n’aboutisse sur mon front, et aussi l’espace situé à l’intérieur ou à l’extérieur de la frappe. Enfin le vide se trouvant derrière le bras armé et carrément derrière le partenaire lui-même. Ici, il ne s’agit plus seulement d’espace mais aussi de visualiser le temps. L’espace/temps, le Mawaï et le De Aï.
Ne plus s’intéresser à ce qu’on voit mais s’attacher à l’invisible. Cette nouvelle perspective déstabilise physiquement, désorganise stratégiquement et perturbe mentalement Uke.
Le rapport de force devient de ce fait inexistant. Uke va avoir la sensation de frapper un nuage, de trancher dans le beurre, de s’enfoncer dans un shamalow, de pousser une porte ouverte.
Cette nouvelle vue, projette Tori dans l’anticipation. Dès lors, plus aucune opposition. Plus de rapport de poids ni de force. Une relation plus intime, plus impliquante avec l’autre.
Pourquoi, alors qu’on sait que lutter contre la force ou la raideur va nous entrainer dans une bataille de chiffonniers persistons-nous vers l’impossible?
L’intelligence stratégique nous offre l’idée d’exploiter d’autres espaces. Alors allons-y !!!
C’est d’ailleurs un des grands secrets de l’Aïkido. Ne pas lutter, mais aller avec… Prendre le risque d’aller dans une direction inhabituelle, imprévue…
Ce qui excitait le fondateur de l’Aïkido, était de défricher des chemins inconnus, « j’aime créer quelque chose là où il n’y avait rien auparavant » O senseï (Aïkido-l’oeuvre d’une vie par Kishomaru Ueshiba chez Budo Editions). Les bras d’ A. Schartzeneger, d’ Hulck ou de Sumotori ne peuvent se verrouiller que dans un sens. Pourquoi alors désirer se mesurer alors que la partie est toute tracée, vouée à l’évident échec?
Par contre aller là où on ne nous attend pas, chercher la diversion, remplir les vides, conduire vers les espaces libres… de nombreuses perspectives s’ouvrent alors…
Cela demande juste une vue d’ensemble élargie, un besoin de d’ouvrir sa conscience d’un cran, de prendre un peu de hauteur, de dé-focaliser notre attention. L’effet « focus » est un grand danger dans les arts de combat, les missions militaires ainsi que dans les métiers de sécurité en intervention. Il faudrait toujours rechercher les opportunités et ne pas plonger bille en tête sur le problème.
Localiser et délimiter rapidement l’espace-problème afin de visualiser et exploiter l’espace-solution. Cette démarche intellectuelle, une fois qu’on l’a conscientiser, doit devenir rapidement notre « fond de commerce » dans nos techniques quotidiennes…
Cette nouvelle stratégie, ne serait elle pas une solution bien au-delà de nos tatamis, dans la vie de tous les jours? A exploiter peut-être…
PB